Expressions politiques
Décembre 2025
Boris Ravignon – Maire de Charleville-Mézières
La nature a horreur du vide
Chacun a encore en mémoire les faits inadmissibles qui se sont déroulés en juillet dernier à la Houillère : dégradation de caméras de vidéoprotection, violences urbaines, tentatives d’intimidation, véhicules incendiés. Et je passe sur les tirs de mortiers d’artifice qui, très clairement, me visaient en personne. Convaincu d’avoir à faire à de vrais trafiquants, j’ai pris la décision de fermer administrativement le café de la Poste et d’interdire son accès grâce à des blocs de béton. Le but étant de rendre physiquement inaccessible ce local soi-disant convivial, en fait surtout connu pour abriter un important point de deal.
Hormis quelques délinquants notoires, cette décision forte et efficace a été approuvée par l’ensemble de la population de ce quartier jusqu’alors apaisé. Une population lassée des trafics en tout genre et mécontente de voir une poignée de voyous tenter d’imposer sa loi. Celle du plus fort, ou du moins du plus menaçant. Jamais je n’accepterai qu’une partie de notre espace public tombe sous la coupe de malfrats !
Afin de mettre un point final et définitif au problème, des contacts ont été pris durant l’automne avec Habitat 08, bailleur social déjà très présent sur ce quartier. Contacts qui ont rapidement permis de trouver une solution concrète et plébiscitée par tous. Dans quelques mois en effet, une Maison France Services (MFS) va ouvrir en lieu et place du trop fameux café de la Poste. Pour rappel, les MFS constituent des antennes locales au sein desquelles les habitants de tel quartier ou telle commune peuvent accéder aux principaux services publics : allocations familiales, retraite, assurance maladie, France travail, finances publiques…
La liste complète et précise des administrations qui seront présentes au sein de la MFS de la Houillère reste encore à peaufiner. Mais une chose est sûre, grâce à ce partenariat avec Habitat 08 et au soutien de l’Etat, nous nous apprêtons à transformer un point de deal en un lieu public de rencontre, pacifié et ouvert à tous, sans aucune forme de discrimination.
La nature a horreur du vide. C’est en créant de l’activité légale au sein de nos quartiers que nous lutterons de la manière la plus efficace contre ceux qui aimeraient en faire leur pré carré.
Anne Papier– Pour la liste « une ville pour tous »
Sécurité
M. le Maire a fait la Une du dernier Carolo Mag sur le thème de la sécurité, un de ses thèmes de prédilection. C’est évidemment pour chacun d’entre nous une priorité. Toutefois, elle est abordée dans notre ville, et quoiqu’en dise la publication, par un angle quasiment unique et insuffisant : la répression. Cette perspective justifie l’armement croissant de la Police Municipale, qui détient désormais dans son arsenal, outre des armes létales, des LBD, tristement célèbres pour avoir éborgné nombre de gilets jaunes et manifestants écologistes…
L’argument justifiant cet armement toujours plus conséquent est qu’on ne peut pas faire face à des tirs de mortiers d’artifice avec des équipements légers. Des attaques au mortier d’artifice sont inadmissibles, comme il est impensable de laisser la délinquance s’emparer de nos quartiers, dans lesquels il faut maintenir l’état de droit. Mais il est nécessaire de chercher aussi le fond du problème : que fait-on pour ne pas en arriver à des tirs de mortier d’artifice et à cette escalade dans la violence ? On oppose aux violences et incivilités urbaines des armes de plus en plus dangereuses, et étrangement, cela continue… La peur de la punition suffit-elle à empêcher la révolte ? Visiblement non. La répression de ces actes est nécessaire, mais ils décroîtraient très probablement si le problème était traité en amont. Une politique publique de sécurité ne peut pas se limiter à un rapport de forces permanent.
On n’apprend les valeurs de la République ni en prison, ni à l’abandon dans les rues. Il faut instaurer un cadre formateur et fédérateur en amont de l’apparition de la délinquance. Educateurs de rues, présence de médiateurs connaissant bien les habitants dans les quartiers, police de proximité bien implantée localement et ayant une bonne connaissance du terrain afin d’être des interlocuteurs, accompagnement des familles, permettraient d’attaquer le mal à la racine. Il faut restaurer la confiance entre cette police de proximité et les habitants pour dialoguer et apaiser les tensions.
Une ville, un quartier, sont une grande famille où il est parfois nécessaire de punir, mais où avant cela on éduque, on accompagne, on aide, on explique et on construit. La ville peut créer des événements culturels et sportifs réguliers délocalisés dans les quartiers, plutôt que de tout concentrer en centre-ville. Les associations doivent être soutenues et non étranglées financièrement, et pouvoir recréer du lien social partout. Les jeunes de nos quartiers ne doivent plus se retrouver sans autre lieu pour se rencontrer que la rue. Il leur faut des infrastructures et des salles accessibles pour pratiquer leurs activités, en présence d’éducateurs de la ville et d’associations. Il est possible d’implanter dans tous les quartiers des lieux de vie collectifs où les énergies se dépensent, s’expriment et font société (sports, culture…). Alors la répression n’interviendra plus qu’en dernier recours.
Christophe Dumont pour la liste « écologiste et citoyenne »
La triple faute
L’Année 2025 aura marqué des reculs inouïs en matière d’écologie, gommant 20 ans d’avancées en matière de lutte contre le changement climatique. Trois exemples parmi les 43 reculs de l’état que le réseau Action Climat a dénombrés pour le seul 1ersemestre 2025 :
Premier recul : la loi Duplomb-Menonville, loi qui visait la réintroduction de l’acétamipride, un néonicotinoïde tueur d’abeilles, potentiellement cancérigène ; elle permet aussi de faciliter la création et de l’extension des élevages industriels, cette loi aura des conséquences graves sur notre vie quotidienne, en particulier sur la qualité de l’eau, question centrale des années prochaines
Deuxième recul : le coup d’arrêt aux renouvelables : le prix de rachat en baisse pour les projets solaires sur les toits, la moindre exigence pour l’obligation des ombrières sur les parkings ,tout cela risque de sonner le glas de la filière, les projets ne se feront plus, ou avec des panneaux chinois. Et ce d’autant que la Région amplifie ce recul en se désengageant cette année du financement des études pour le solaire en toiture en injonction directe dans le réseau.
Troisième recul : la suspension de MaPrimeRénov’ : La résorption des passoires thermiques est la première chose à faire, en les résorbant, on lutte contre le désordre climatique, on donne du travail aux artisans et on réduit la facture d’énergie des plus précaires ; Pourtant, à rebours de ce qu’il faudrait faire, l’état interrompt ses aides puis en durcit l’accès, fragilisant le secteur dans une région qui, elle-même, gèle certaines de ses dispositifs.
Les scientifiques sont unanimes : la transition écologique nécessiterait pourtant une enveloppe massive de financements supplémentaires. Or, le budget de l’état pour 2025 actait une baisse brutale des financements dédiés à la transition. le budget 2026 n’augure rien de bon. La région, l’agglo et la ville qui voient leurs aides réduites emboîtent le pas…
Ne pas investir aujourd’hui dans la transition, c’est exposer le pays à des crises plus coûteuses demain.
l’ADEME estime que l’inaction pourrait coûter l’équivalent de 10 % du PIB français, en cas de réchauffement de 3 degrés et demi.
Pourtant les citoyens nous réclament une eau pure, une énergie verte, une alimentation saine, 69 % des français sont hostiles au retour des néonicotinoïdes, 84 % des Français sont favorables aux renouvelables. Ils placent la pureté de l’air en tête de leurs préoccupations, 88 % de français comptaient sur MaPrimeRénov’ pour réduire leur facture d’énergie ! Pourtant les entreprises ont besoin de visibilité, les 100 000 artisans menacés, selon la Fédération Française du bâtiment, par les reculs en matière d’aide à la rénovation thermique les 25000 employés de la filière solaire. Et toutes les entreprises dont la décarbonation est la condition de la compétitivité. Encore plus grave, les collectivités sont touchées par la fin des aides de l’état pour la transition, l’ADEME voit ses crédits d’incitation largement rabotés, le fonds vert qui permet à l’état d’aider les communes pour la transition écologique est diminué de moitié chaque année, il n’aide plus la ville de Charleville-Mézières à rendre son éclairage public moins gourmand par exemple. L’agglomération et la ville, déjà très en retard sur ces sujets, sont donc moins incitées à mettre les bouchées doubles…
Cette politique court-termiste fait peser sur les plus précaires et sur l’ensemble des citoyens le coût croissant de l’inaction. C’est une triple faute : écologique, économique et sociale